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In this performance, I violently hit my head on a glass to break it in this film. It was made in one take without repetitions, without cuts, without editing. A moment of truth. This performance where I put my body to a severe test is a reaction to the economic, social and politic situation and the extreme violence Haiti is experiencing those last years. 
 

Performance Glass Head, 2021
 

Tête_Vitre, Maksaens Denis

Mes phalanges s’en souviennent encore

 

 

            Il y a de ces films que l’on regarde les poings serrés. On se demande si c’est le matériau cinématographique lui-même, l’usage qui en est fait, ou si c’est le contenu, ce qui est représenté, qui nous est insoutenable. Comme le très révoltant The House that Jack build – Lars Von Trier, 2018 ; meurtres en série et descente aux enfers, littéralement. Comme le très choquant Salò – Pier Paolo Pasolini, 1975 ; adapté du roman Les 120 Journées de Sodome du Marquis de Sade. Dans ces deux cas il s’agit de long-métrage, la terreur s’installe et bénéficie d’éléments de contexte. 

 

            J’ai regardé la performance casse-tête de l’artiste vidéaste Maksaens Denis. En 13 minutes, j’ai serré les poings autant que je l’ai rarement fait devant les films extrêmes. Mes phalanges s’en souviennent encore.

 

            Le dispositif est pourtant simple, comme il l’est lors des plus frappantes performances. C’est le cas de le dire, puisque l’écran qui sépare le performeur du spectateur est attaqué, pour ainsi dire, frontalement. Pendant 13 longues minutes, Denis essaie de briser quelque-chose. La séparation acteur/spectateur, les malheurs du monde, les malheurs de son pays, ses tristesses et ses peines personnelles : à vous de choisir. Lui, il tente. Il se donne. Il essaie d’y arriver.

 

            C’est un plan séquence, Denis ne nous cache rien. Les coups tombent. Il ne saigne pas. Il s’adresse à un complice. La performance continue. On lui en veut de nous faire du mal, sans nous toucher. On lui en veut de se faire du mal, se scarifier. Mais… comme s’il y avait une narration sous nos yeux, on veut connaître la suite. Où, diable, cela va-t-il s’arrêter ? Il veut briser la vitre, il veut saigner. Le mur de la réalité, la prison du réel ou les choix humains : à vous de voir.

 

            Il y a de ces performances qui choquent nos certitudes. On veut que cela s’arrête. On regarde. On questionne ce combat, sans le connaître. Au bout du compte, seul l’outil approprié rompt le cercle infernal. Il faut savoir s’y prendre pour briser les tabous. Je vous jure, à la fin des fins, que j’ai entendu quelqu’un gémir dans la pièce. 

 

            L’artiste est épuisé. Il a peut-être gagné, peut-être perdu la bataille – Le malheur est souvent plus fort que nous. Il nous a montré quelque-chose.

 

Néhémy Dahomey,

Paris 2023

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